Cet article est issu du numéro 2 de Pays, consacré au Vercors.

Le prix de la paix

Défenseure du loup, du renard ou du blaireau, l’ASPAS s’attaque depuis 40 ans aux pratiques de chasse abusives. L’association pour la Protection des Animaux Sauvages a aussi acquis en quelques années 1 200 hectares de terres pour les laisser en « libre évolution. » Des havres de tranquillité, où toute intervention humaine est interdite. Son dernier coup, très controversé : le rachat d’un domaine de chasse en enclos, en plein cœur du Vercors.

Carlotta Morteo & Alexa Brunet

L’ASPAS rachète des terrains pour laisser les animaux en libre évolution. Dernièrement, elle a acquis un ancien domaine de chasse dans le Vercors. — Alexa Brunet

Pas farouches les biches. À seulement quelques mètres du quad, des élaphes et leur progéniture broutent avec flegme. « Les cerfs ont perdu leurs bois au mois de mars, ils sont en train de les reconstituer. Vous voyez, ils sont en velours », indique de sa voix douce Martine, la jeune garde de la réserve. Tout autour, une dizaine de sangliers et au moins trois fois plus de marcassins, avec leurs petits pyjamas rayés, la truffe au sol, indifférents à notre présence. Il est bientôt sept heures du matin, il fait encore frais et la brume remonte tranquillement de la Lyonne, la rivière en contrebas. En face, les falaises dentelées, dénudées, si caractéristiques des hauteurs du Vercors se hissent au-dessus des nuages.

Équipée telle une ranger — chaussures de montagne, pantalon multipoches, polaire, couteau, jumelles — Martine connaît bien les habitudes des animaux qui vivent sur le Domaine de Valfanjouse, cette ancienne réserve de chasse rachetée en 2019 par l’ASPAS, rebaptisée aujourd’hui Vercors Vie Sauvage. Tous les jours, cette passionnée de nature observe les sangliers, les cerfs, les daims et les mouflons traverser les prairies au petit matin, avant qu’ils ne se réfugient dans les forêts de hêtres. Ils ne craignent plus les tirs, mais sont toujours coincés dans les 250 hectares clôturés de la propriété.

À mesure que l’on descend vers l’ancien gîte de chasse, les animaux sont…

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Derrière cet article…

Carlotta Morteo

Citadine polyglotte, reporter pour RFI, Carlotta s’est installée il y a quelques années en Ardèche. Désormais néo-rurale, elle explore le bruit du monde depuis les campagnes, de la France aux tats-Unis, de l’Italie à la Mauritanie. Ses dadas : les constructions identitaires, le déséquilibre des pouvoirs, l’art et la manière de dire le monde pour le faire advenir.

Alexa Brunet

Membre du collectif Transit, Alexa explore depuis vingt ans le médium photographique. Elle mène des projets militants en collaboration avec des rédacteurs et rédactrices sur des questions de société telles que l’habitat, l’agriculture ou les nouvelles technologies. Elle vit en Ardèche. Son travail est édité par Le Bec en l’air.