Cet article est issu du premier numéro de Pays, consacré à Saint-Malo et ses alentours.

Semper Fidelis : l’esprit malouin

« Toujours fidèle » : Saint‑Malo partage sa devise officielle avec une unité de l’armée romaine, le Corps des Marines des États‑Unis, ainsi que différentes unités militaires françaises. C’est aussi la devise de quelques villes, dont Cherbourg en France, Exeter en Angleterre ou Lviv en Ukraine. Mais sur place, on lui préfère bien souvent une expression très locale, dont les origines remontent à la fin du XVIe siècle.

Baptiste Thevelein & Benoît Michaëly
Le drapeau malouin flotte fièrement sur les remparts de la vieille ville.

C’est une période méconnue de l’histoire de France, mais fondatrice pour Saint‑Malo et dont les conséquences vivent toujours aujourd’hui, particulièrement entre ses remparts. Cette époque lui a laissé un dicton aussi surprenant que provocateur : « Ni français, ni breton, malouin suis ». 

Pendant quatre années, la ville fut une république, une micronation, enclave au sein du royaume de France. Prospère et attractive, à une époque de découvertes et de conquêtes, elle déclara formellement son indépendance le 11 mars 1590. Le gouverneur de Saint‑Malo, Honorat de Bueil, fut tué ce soir‑là par des insurgés dans l’enceinte du château, où ceux‑ci déclarèrent solennellement leur sécession du royaume de France.

Un peu moins d’un an auparavant, le roi Henri IV, protestant, avait hérité du trône de France : un affront pour les marchands malouins, qui refusèrent de reconnaître ce souverain non catholique. Ces derniers craignaient les conséquences que cette reconnaissance pouvait avoir sur l’économie locale. Dans le même temps, ils souhaitaient se tenir à distance de l’extrémisme de la Ligue catholique, qui combattait ardemment le protestantisme et militait violemment pour le retour d’un roi catholique.

La cité se dota de lois spécifiques, de structures de gouvernement, et tissa des liens avec de nombreux partenaires. Alors que le roi de France a accepté de se convertir et d’abjurer définitivement sa religion, il négocie avec la République de Saint‑Malo son retour dans le royaume, qui est effectif en octobre 1594. Les privilèges, franchises et autres mesures fiscales spécifiques sont maintenus dans la ville, qui sort renforcée de cet épisode.

Toujours une exception

Aujourd’hui, les stigmates de ce conflit ouvert entre le royaume de France et la ville de Saint‑Malo sont effacés, mais cet héritage d’indépendance, devenu mythe, continue de différencier la ville des autres cités bretonnes.

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