C’est une période méconnue de l’histoire de France, mais fondatrice pour Saint‑Malo et dont les conséquences vivent toujours aujourd’hui, particulièrement entre ses remparts. Cette époque lui a laissé un dicton aussi surprenant que provocateur : « Ni français, ni breton, malouin suis ».
Pendant quatre années, la ville fut une république, une micronation, enclave au sein du royaume de France. Prospère et attractive, à une époque de découvertes et de conquêtes, elle déclara formellement son indépendance le 11 mars 1590. Le gouverneur de Saint‑Malo, Honorat de Bueil, fut tué ce soir‑là par des insurgés dans l’enceinte du château, où ceux‑ci déclarèrent solennellement leur sécession du royaume de France.
Un peu moins d’un an auparavant, le roi Henri IV, protestant, avait hérité du trône de France : un affront pour les marchands malouins, qui refusèrent de reconnaître ce souverain non catholique. Ces derniers craignaient les conséquences que cette reconnaissance pouvait avoir sur l’économie locale. Dans le même temps, ils souhaitaient se tenir à distance de l’extrémisme de la Ligue catholique, qui combattait ardemment le protestantisme et militait violemment pour le retour d’un roi catholique.
La cité se dota de lois spécifiques, de structures de gouvernement, et tissa des liens avec de nombreux partenaires. Alors que le roi de France a accepté de se convertir et d’abjurer définitivement sa religion, il négocie avec la République de Saint‑Malo son retour dans le royaume, qui est effectif en octobre 1594. Les privilèges, franchises et autres mesures fiscales spécifiques sont maintenus dans la ville, qui sort renforcée de cet épisode.
Toujours une exception
Aujourd’hui, les stigmates de ce conflit ouvert entre le royaume de France et la ville de Saint‑Malo sont effacés, mais cet héritage d’indépendance, devenu mythe, continue de différencier la ville des autres cités bretonnes.