Cet article est issu du premier numéro de Pays, consacré à Saint-Malo et ses alentours.

Servane Escof­fier, entre terre et mer

À presque 40 ans, la navi­ga­trice malouine au palmarès admi­rable, issue d’une famille de gens de mer, sillonne le ter­ri­toire qui l’a vue grandir avec une inten­si­té inégalée. Du port de Saint‑Malo au bourg de Cancale, elle nous emmène au mois de novembre sur cette côte escarpée dont elle s’inspire au quotidien.

Manon Boquen & Benoît Michaëly
Servane Escof­fier à la pointe de la Varde, où elle a grandi.

Chapitre 1 : La Pointe de La Varde

~ Elle avance le bout de son nez sur la Manche, avec ses landes ébou­rif­fées par les vents. La Varde, cette pointe sauvage, offrant un panorama luxu­riant sur la côte d’Émeraude, donne à voir Saint‑Malo sous un autre angle. Servane Escof­fier connaît ce sen­ti­ment. Elle a grandi juste là, sur le front de mer.

La Varde reste le recoin sauvage de la cité malouine. Que vous évoque‑t‑elle ?

Il y a des endroits comme cela où le cœur se serre sans que l’on puisse l’expliquer. C’est exac­te­ment ce que je ressens en ce moment. La maison que l’on voit en face, avec les bow‑windows, est celle où j’ai grandi, de mes huit ans jusqu’à ce que mes parents divorcent, quand j’avais 16 ans. Enfin, pas vraiment, puisque ma mère l’a quittée à mes 23 ans. J’ai fait ma vie ici. Peut‑être que ce sont ces sou­ve­nirs qui me pro­curent cette sen­sa­tion. J’ai eu la chance de grandir là mais les évé­ne­ments de la vie, plus négatifs, qui sont arrivés ensuite, me donnent un sen­ti­ment partagé.

J’allais sur la plage du Pont, juste en bas. On faisait de l’Optimist avec la SNBSM, le club du coin, et on des­sa­lait là . De cette période, j’ai gardé des amis incroyables. Je reviens de temps en temps, en balade avec mes enfants mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir ce sen­ti­ment en arrivant. Celui du bonheur de l’enfance, disparu peut‑être. Ça me fait vraiment quelque chose. Ce sont aussi les sou­ve­nirs des premiers amours. À la pointe, il y avait même une boîte de nuit, l’Escalier. Je n’y suis jamais allée mal­heu­reu­se­ment. Je crois que, lorsqu’on vieillit, on se rend compte de la chance qu’on a eu de grandir à un endroit. Cela ne vient pas for­cé­ment sur le moment.

Quel sen­ti­ment vous pro­cu­rait la mer ?

Je n’en avais pas peur. Quand je la regar­dais, comme je la regarde aujourd’hui, au bord des falaises, j’avais l’impression que le monde était là, et s’ouvrait devant moi. Je crois que c’était ça.

Avant d’arriver ici, où viviez‑vous ?

J’ai grandi en Nor­man­die, jusqu’à mes sept ans. Mais nous venions régu­liè­re­ment en Bretagne. Une de mes grands‑mères vivait à Cancale. Toutes nos vacances d’été se pas­saient là. 

Quels sou­ve­nirs gardez‑vous de cette enfance dans ce cadre efflorescent ?

Grandir à Saint‑Malo, c’était l’éclate. On allait tout le temps sur la plage du Pont après l’école, on vadrouillait à vélo partout sur la pointe de la Varde, qui était moins protégée à l’époque qu’elle ne l’est aujourd’hui. On se faisait disputer par les parents parce qu’il y avait des

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