Cet article est issu du numéro de Pays consacré à Mayotte.

Course de pneus, tout roule

Évé­ne­ment sportif et culturel incon­tour­nable de l’île, la course de pneus enchante toutes les géné­ra­tions à chaque début de grandes vacances, tant par le défi physique qu’elle repré­sente que pour son carac­tère festif. C’est Jack Passe, un pro­fes­seur d’EPS, qui a méta­mor­pho­sé ce jeu d’enfants en véri­table symbole de Mayotte en 1984.

Nora Godeau & David Lemor
C’est le début de la course de pneus en caté­go­rie garçons. Sur les visages règne la concentration.

Les rues de Mamoud­zou vibrent de joie ce samedi 25 juin 2022. Des milliers de per­sonnes sont arrivées des quatre coins de l’archipel pour assister au retour de l’irremplaçable course de pneus, après deux années de version numé­rique imposée par la crise sani­taire. Au rond-point du Baobab, le lieu de départ, les coureurs et cou­reuses se pré­parent dans la bonne humeur. La musique résonne et motive les troupes. Si aucun thème n’a été exigé, certain·es ont néan­moins décidé de se déguiser pour fêter la reprise de leur évé­ne­ment préféré. Super­hé­ros, animaux fan­tas­tiques ou tout sim­ple­ment arc-en-ciel de couleurs sur le visage, enfants comme adultes aiment conférer à ce moment des allures de carnaval. 

L’objectif de la journée ? Faire rouler un pneu à l’aide de deux bâtons sur un iti­né­raire de 1 850 mètres, afin d’atteindre en premier la ligne d’arrivée. Les participant·es sont rigou­reu­se­ment chronométré·es et les trois gagnant·es de chaque caté­go­rie reçoivent des lots de la part des sponsors de la com­pé­ti­tion. Friand de ce rendez-vous annuel, le public déborde sur l’ensemble du parcours qui s’étend d’un quartier sud de Mamoud­zou jusqu’à la place Zakia Madi, dans le centre-ville.

Et le jeu devint course

500 enfants — 300 garçons et 200 filles — et 500 adultes — dès douze ans — par­ti­cipent cette année à cette mani­fes­ta­tion emblé­ma­tique. Des per­son­na­li­tés du monde poli­tique et éco­no­mique, comme le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, ou le direc­teur régional d’Orange, André Martin, leur remettent les trophées. C’est dire l’importance que revêt ce rallye à roue pour les habitant·es du ter­ri­toire. L’initiative provient pourtant d’un pro­fes­seur d’EPS d’origine mar­seillaise, qui a eu envie de trans­for­mer ce jeu tra­di­tion­nel en défi sportif en 1984. Jack Passe, venu ensei­gner à Mayotte, avait acquis une forte répu­ta­tion et son décès, en août 2020, a marqué les esprits. 

« C’est en voyant des enfants s’amuser à faire rouler des pneus à l’aide de deux bouts de bois que j’ai eu l’idée de créer cette course », aimait à raconter le fon­da­teur de l’événement le plus popu­laire de l’île, éga­le­ment à l’origine du festival de l’image sous-marine, autre temps fort culturel à Mayotte. « Quand j’étais petit, j’avais hâte d’être assez grand pour y par­ti­ci­per, car ses vain­queurs étaient très res­pec­tés et admirés », confie Karim, qui habite Mamoud­zou et est aujourd’hui âgé d’une tren­taine d’années. « Nous com­men­cions à chercher nos pneus environ un mois aupa­ra­vant auprès des gara­gistes de quartier et nous passions des heures à nous entraî­ner », ajoute-t-il, les yeux pétillants de bonheur à l’évocation de ce souvenir.

L’attirail pour réussir

Tra­di­tion­nel­le­ment, l’événement était destiné aux enfants, garçons et filles, qui arri­vaient à passer sous la toise his­to­rique des 1,45 mètre. Au fil des ans, il s’est ouvert aux adultes, réparti·es en dif­fé­rentes caté­go­ries : hommes, femmes, « big mamas » et « gros pneus ». La troi­sième correspond 

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